Vendredi 1er avril, quelques centaines de Hongrois et Hongroises se sont rassemblés devant le Parlement, à Budapest, à l'occasion d'un concert de solidarité en soutien aux pédagogues en grève. Ils et elles réclament plus de reconnaissance pour leur métier. Depuis 2016, le gouvernement de Viktor Orbán n'a eu de cesse de précariser la profession.
« Pas de prof, pas d'avenir », clame la foule. Malgré le froid, la place du Parlement ne désemplit pas. Un concert de solidarité organisé par le rappeur hongrois Noar, connu pour protester contre Viktor Orbán et son gouvernement, a rassemblé quelques centaines de personnes. Pédagogues, élèves, parents et autres sont venus pour protester contre la précarité de l'éducation.
Barta Marlanna et Szalma Orsi travaillent dans une école primaire de Budapest. Leurs élèves ont entre 6 et 14 ans. Âge décisif pour construire de bonnes bases de langue et de réflexion. C'est pourquoi ces deux femmes ne se sont mises en grève qu'une seule journée. « C'est un piège, nous adorons notre travail et les enfants, malgré nos revendications nous ne pouvons pas les abandonner », expliquent-elles.
Aujourd'hui, les enseignantes et enseignants réclament plus de considération, notamment en ce qui concerne leur salaire. En moyenne, elles et ils gagnent 250 000 forints par mois (l'équivalent de 680 €), salaire parmi les plus faibles de l'Union européenne. Une somme plus élevée que le salaire minimum hongrois (161 000 forints, soit environ 442 €) mais pas assez pour vivre. « Si on déduit notre loyer, il nous reste à peine 30 000 forints (environ 80 €). La vie est beaucoup trop chère par rapport à nos salaires », explique Barta Marlanna. Conséquence, la Hongrie manque cruellement de pédagogues. « Le métier n'attire pas. Il n'y a que des vieux, les plus "jeunes" ont 40 ans. » Des tirelires circulent pour collecter des dons redistribués aux enseignantes et enseignants en grève.
Orbanisation de l'éducation
Les élèves aussi pâtissent de cette précarité de l'éducation, comme en témoigne Kata, 18 ans, venue soutenir en chemise à carreaux (symbole de la protestation) ses professeur·e·s. « Le budget de l'État alloué à l'éducation est insuffisant », affirme-t-elle avant de rejoindre ses quatre amies qui scandent en chœur : « Une bonne éducation est une éducation libre ! » La jeune femme dénonce par la même occasion une « Orbanisation » du système éducatif : « Depuis deux ans, et la réforme des programmes scolaires, notre niveau a baissé. Mes chances pour étudier dans l'université que je veux, ou à l'étranger, s'amenuisent. »
Déjà en grève en 2016, puis en 2018, les pédagogues du pays, mal payés, subissent également la censure des programmes scolaires, devenus « nationalistes et conservateurs », selon Kata. « Nous n'apprenons plus à argumenter mais juste des leçons par cœur. Des philosophes français ont disparu de nos bouquins. » Discours et concerts se sont enchaînés jusqu'à la tombée de la nuit.
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